BANGWE.NET : «Découvrez l'info de nos Bangwé»
Les mohéliennes alertent Sambi de bonne heure !
Le 02/02/2010
Ce samedi après midi, la place de l'indépendance de Fomboni, ou place de la réconciliation nationale était envahie de femmes venues de différentes régions de Ngazidja et Mwali, réclamer la tenue des élections primaires à Mohéli dès ce mois de mars. « Le 26 février Sambi doit appeler le collège électoral sinon nous vous inviterons à Moroni pour le lancement officiel des primaires, qu'il le veuille ou pas », lance la première dame de l'île de Ngazidja Mme Ralia Abdouloihabi lors de son intervention devant une foule de plusieurs centaines de femmes. Et derrière elles, les deux anciens présidents de l'assemblée nationale Saïd Dhoifir Bounou et Salim Djâbir Salim. L'ancien ministre Ali Assanaly, le président du conseil de l'île de Mwali Attoumane Mahoma (Passoco) et d'autres hautes personnalités ont pris part à ce rassemblement de la gente féminine.
« Dans tous les combats mohéliens ce sont les femmes et les jeunes qui prennent le devant, nos pères, nos grand-frères, nos maris nous soutiennent » rappelle Mme Hadidja Mansour (dite Mme Soifa) l'animatrice principale et candidate malheureuse à la députation dans la 2e circonscription (Fomboni-Moimbao) sous l'étiquette du parti ANC.
La cérémonie a été également honorée par la première dame de l'île de Djoumbé Fatima Mme Djazmati Radjabou. Mme Mohamed Hassanaly, l'ancienne ministre du pouvoir insulaire Mme Hidaya Salim, l'ancienne commissaire de l'île aux affaires féminines Mme Bouchrati Abdoulhalim, l'ancienne ministre de l'Union sous le régime Azali, Mme Sitti Maoudjoud et plusieurs autres cadres.
Après avoir remercié les femmes de Ngazidja pour le déplacement qui « témoigne leur solidarité pour la cause mohélienne », Mme Andhoimati Mikidadi (Mma fayizi) la première à prendre le micro a tenu d'abord à rappeler que personne n'a fait l'école de président pour dire que Mohéli ne peut pas être à la tête de ce pays comme le disent certains. « Lors du tour de Ngazidja et Ndzouani les mohéliens ont participé massivement et quand approche le tour de Mwali, on vient avec un referendum modifiant la constitution pour s'éterniser au pouvoir » a-t-elle martelé.
Et l'oratrice de poursuivre « lors des dernières élections législatives, vous avez vu comment les mohéliens se sont exprimés, pour montrer au monde ce que veut Mohéli. Nous sommes prêts pour cette tournante dès le 26 mai ». « C'est nous qui représentons ici Mohéli, mais pas ceux qui, contre un morceau de pain, disent n'importe quoi... », faisant allusion à un notable de Mwali qui a été chahuté samedi matin à l'aéroport de Fomboni par des femmes déchaînées, pour avoir tenu des propos à Moroni favorables à un éventuel prolongement du mandat de Sambi. Elle a rappelé aux députés et conseillers de l'île l'animal qui a été sacrifié et le hitma lu sur cette même place pour la même cause, « si vous faites la moindre bêtise ce hitma tranchera » conclut-elle.
Quant à Bibi Mkouboi de Mitsamihouli, « nous sommes venues de Ngazidja vivre la réalité puisque là-bas on nous fait croire que Mohéli n'est pas encore prête pour gouverner le pays, or ce que je vois aujourd'hui, c'est tout le contraire, un signe que le 26 mai 2010 la tournante viendra » dit-elle. « Ce 26 mai nous allons déraciner le baobab pour planter un cocotier » lance-t-elle.
L'on notera entre autre l'intervention de Maman Djamila, la présidente de ce mouvement de Ngazidja dont l'objectif selon elle est de défendre le droit de la femme, lutter contre le séparatisme et promouvoir l'égalité des îles. Elle a tenu à préciser que les 7 régions de Ngazidja sont bien représentées à cette cérémonie. « Si les primaires ne sont pas tenus dans les prochaines jours, en 2014 ce sera à nouveau le retour de Ngazidja », a surenchéri Mama Djamila avant d'ajouter que si « vous allez en djapawa ou à pieds, nous irons toujours avec vous jusqu'à obtenir le du de Mwali le 26 mai ».
Quant à Mme Abdouloihabi qui dit avoir pris part dans la lutte mohélienne pour la présidence de l'assemblée dans un mouvement connu sous le nom de hahihou, « Mohéli a géré des primatures, des présidences de l'assemblée, qu'est-ce qui l'empêcherait de diriger le pays » s'est-elle demandé avant de préciser que le congrès ne décidera rien pour le 26 mai. Il décidera de la date de l'élection d'un président avec des gouverneurs mais pas sur le terme de son mandat qui s'achève ». « Comme a dit l'autre s'il veut continuer ses projets, qu'il vienne se porter candidat à Mwali, la constitution le lui permet » a conclu la première dame de l'île de Ngazidja devant une banderole sur laquelle on peut lire « ye shariya na shistehiwa ba wuwo ndo mzazé wahé amani ».
Mouayad Salim(HZK-Presse)
- Commentaires textes : Écrire
Sambi avait envoyé une lettre au président Azali
Le 01/02/2010
Nous publions ci-après une lettre ouverte que le citoyen Ahmed Abdallah Sambi avait adressée au président Azali Assoumani pour le mettre en garde contre les conséquences d'un non-respect éventuel de la tournante d'Anjouan. Certes, vous en conviendrez avec moi, ce n'est pas le premier fossé entre les paroles et les actes de l'intéressé, mais ce courrier a le mérite de renseigner le double discours et l'hypocrisie de nos dirigeants.
Lettre ouverte à Son EXcellence M. le Président de l'Union des Comores
Excellence,
Comme à l’accoutumé, à l’occasion du jour sacré de l’Id el Fitr vous vous êtes adressé à la nation pour exprimer aux Comoriens vos vœux pour la fin de ce mois sacré et en même temps toucher du doigt un certain nombre de points relevant de leur quotidien . Pour cette année, ce fut la hausse du carburant, la question de la tournante et enfin le problème de Mayotte avec tout ce qu’il implique (traque des comoriens, participation des jeunes Mahorais aux jeux des îles, Visa Balladur etc.). Vous avez su faire preuve de discernement, en rassurant les citoyens que le carburant connaîtra une baisse, minime soit-elle, mais significative au vue de la conjoncture marquée par une crise socioéconomique aiguë. Cela était crucial, car le peuple entier l’attendait, tout comme il attendait avec impatience votre allocution au lendemain des évènements qui ont secoué notre pays, il y a quelque semaines. Cette fois ci vous avez montré aux Comoriens que vous savez entendre leurs doléances.
Pour la question de Mayotte, compte tenu de son ampleur et de la gravité que connaissent les évènements ces derniers temps, je dois vous dire, Monsieur le Président, que votre silence, tout comme celui de votre Gouvernement étaient trop pesants même si nous savons tous que cette affaire vous préoccupe, à plus d’un titre. En effet, votre Gouvernement se devait d’agir, surtout quand on sait à quel danger sont exposés nos compatriotes !(les bateaux qui arrivent tous les jours dans nos ports témoignent de la traque que subissent nos frères à Mayotte). Quant à la participation des jeunes Mahorais aux jeux des îles, je laisse le soin à la population comorienne de juger votre décision.
Et pour la tournante, et c’est là où je vais m’attarder un peu plus, comme vous l’avez, sans nul doute, imaginer, je dois vous avouer que j’ai été, on ne peut plus, perplexe car entre votre discours en français et celui en comorien, la confusion était si grandissante ! Oui, Monsieur le Président, si à travers votre allocution en français vous manifestiez votre entière disponibilité à organiser les élections, à condition qu’elles soient libres, transparentes et démocratiques, ce qui est, d’ailleurs, tout à fait louable, votre discours en comorien laisse dubitatif à plus d’une personne !
Comment vous pourrez, vous, Garant de l’exercice de l’autorité de l’Union sur l’ensemble du territoire, brandir l’absence de celle-ci à Anjouan quand on sait que vous aviez tous les moyens pour que cette autorité y soit effective.
Il est vrai que les autorités anjouanaises, au premier chef desquelles, le Président lui-même, n’ont jamais vu d’un bon œil à ce que l’Union des Comores y soit présente car trop encombrante ! mais il faut savoir que l’absence de celle-ci est beaucoup plus préjudiciable au citoyen anjouanais qu’à ces autorités ! Prenez le cas du secteur de l’éducation, pour ne citer que celui là, où les enfants anjouanais sont plus que victimes de l’entêtement de leurs chefs, lorsque nous savons que, pendant ce temps, les propres enfants de ceux-ci passent le baccalauréat comorien et fréquentent soit l’Université des Comores, quand ils n’ont pas les moyens de se payer des études à l’extérieur, soit bien sûr les universités étrangères, quelquefois même avec une bourse octroyée par les autorités de l’Union.
Mais vous aussi, Monsieur le Président, vous avez des Vice Présidents qui représentent les îles et qui auraient été plus utiles dans leurs îles respectives, car proches de leurs électeurs, si, bien entendu, vous leur aviez conféré les pouvoirs nécessaires à l’exercice de leur autorité. Cela aurait donné plus de crédit à l’Union des Comores !
Monsieur le Président, quels moyens ont ils été accordés à vos représentants (l’ancien Premier Ministre, Mr Nourdinne BOURHANE ; c’est celui là qui me vient à l’esprit !) là bas, à Anjouan ou même à Mohéli avec votre frère d’arme le Colonel Anrifi ? Parlant de frères d’armes, il est vrai que l’Armée Nationale de Développement (AND) n’a aucune légitimité à Anjouan ; mais n’est ce pas vous qui avez trop concédé aux responsables séparatistes lors des multiples rencontres de Fomboni, leur faisant comprendre que le statut d’Anjouan reste inchangé jusqu’à ce que le processus de réconciliation nationale arrive à son terme ! Je pense, sans donner raison à ceux qui empêchent à ce que l’Armée soit unique partout aux Comores, que ce dernier n’arrivera, effectivement, à son terme que lorsque la tournante aura tourné ! et puis, entre nous, qu’est ce qui a été fait depuis que la loi sur la sécurité intérieure a été votée et non promulguée ?
Monsieur le Président, à quel moment avez vous interpellé la Communauté internationale pour lui signifier de la non présence de l’autorité de l’Union des Comores à Anjouan, si ce n’est lorsque le Député de Domoni, surnommé « Félé » fut refusé à l’Assemblée de l’île ! et grâce à la pression de ladite Communauté internationale, la Démocratie a triomphé !
Donc Monsieur le Président, et de Grâce, ne sapez pas le processus de réconciliation nationale, si cher aux comoriens, sous prétexte que vous n’êtes pas prêt à assumer la responsabilité d’organiser des élections là où l’autorité de l’Union ne se soit pas exercée ! La Communauté internationale (l’ONU, l’UA) n’organise pas d’élections, elle appuie un processus électorale, supervise le déroulement des élections, mais n’organise pas, encore une fois, d’élections ! Nous ne sommes pas en Afghanistan, ni en Iraq pour confier à la communauté internationale l’organisation de nos élections. La Communauté internationale, va nous aider à réaliser ces dernières et nous en sommes d’avance très reconnaissant et la remercie infiniment !
Pour finir, Excellence, je voudrai faire appel à votre sens de l’honneur et à votre sens de la responsabilité pour que vous meniez le bateau de la réconciliation nationale à bon port, et que Commandant de ce bateau depuis les premiers accords de Fomboni, vous débarquiez avec tous les honneurs !
Je vous remercie !
Ahmed Abdallah Sambi
- Commentaires textes : Écrire
Ahmed Said Djaffar se relaxe !
Le 01/02/2010
Le chef de la diplomatie comorienne a été formel : " le principe de la présidence tournante entre les îles n’est pas remis en cause. Le prochain président de l’Union des Comores sera d’abord choisi à Mohéli " dans le cadre des primaires.
Ahmed Said Djaffar répondait ainsi à un journaliste de la radio française, Radio France internationale (Rfi) qui, citant l’opposition comorienne, prête au président Sambi l’intention de vouloir s’éterniser au pouvoir en violant le principe de la tournante.
Par ailleurs, il a déploré la menace, à peine voilée, d’une sortie violente des casernes des militaires lancée sur les ondes de cette même radio française, par l’ancien président Azali, qui avait fait référence à "l’interposition" de l’armée de 1999 qui lui avait permis de prendre le pouvoir par la force.
Il a indiqué que l’élection du prochain président peut intervenir cette année, comme elle peut intervenir l’année prochaine ou celle d’après, selon la décision que prendront les députés et les conseillers des îles réunis en congrès, comme le prévoit une disposition de la loi fondamentale qui dit que " A titre transitoire et en vue de l’harmonisation des élections des chefs exécutifs des îles et de l’Union, les députés et les conseillers réunis en congrès déterminent, à la majorité absolue, la date des élections du Président de l’Union et des gouverneurs ".
Pour sa part, Abdou Youssouf de la mouvance présidentielle a précisé que contrairement " aux allégations de ceux qui souhaiteraient pêcher en eau trouble ", le but de la réforme constitutionnelle soutenue par différents partenaires au développement n’est pas de prolonger ou diminuer les mandats mais plutôt de les harmoniser en organisant les élections le même jour pour des raisons évidentes d’économies budgétaires.
Pour lui, le pays ne peut pas s’offrir " le luxe d’organiser une échéance électorale chaque année en comptant sur la générosité de la communauté internationale " dans le cadre de la coopération bilatérale ou multilatérale.
Les défenseurs du régime se flattent de " la confiance maintes fois renouvelée " au président Sambi par le peuple comorien notamment lors de la révision constitutionnelle de mai 2009 et surtout des législatives de décembre dernier.
De fait, en acceptant la révision de la Constitution proposée par le gouvernement, en donnant au pouvoir une majorité aussi confortable au sein du parlement, " les Comoriens laissent ainsi au président Sambi la possibilité d’imprimer ses marques sur le pays et ses institutions. Ses opposants doivent se plier aux verdicts des urnes et continuer le combat pour le pouvoir dans le cadre de la légalité républicaine ".
Source : Al-watwan
- Commentaires textes : Écrire
Kadhafi passe la main a Bingu Wa Mutharika
Le 01/02/2010
Le président du Malawi, Bingu Wa Mutharika |
Le colonel Kaddafi n'est plus président de l'Union africaine. Lors de la cérémonie d'ouverture du 14e sommet des chefs d'Etat, le 31 janvier, il a passé la main à son successeur.
Le président du Malawi, Bingu Wa Mutharika avait été choisi par ses pairs de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), selon une règle tacite de rotation régionale de la présidence en exercice de l'UA.
Le baroud d'honneur du « Guide » libyen n'aura finalement pas duré. Quelques jours avant le sommet, sans qu'il ait jamais annoncé son intention de prolonger son mandat, Mouammar Kaddafi faisait l'objet de toutes les rumeurs. Une campagne avait été menée par ses proches dans nombre de pays du continent pour qu'il soit candidat à sa propre succession.
Devant la fermeté de la SADC et de la Commission de l'UA, il a fini par plier. Il aura suffi d'une trentaine de minutes aux leaders du continent pour imposer Mutharika comme président en exercice, lors d'une réunion à huis clos tenue en plein milieu de la cérémonie d'ouverture.
Sous l'oeil de chefs d'Etat amusés
A l'ouverture du sommet des chefs d'Etat de l'Union africaine (UA), à Addis-Abeba, le guide libyen s'est résigné à céder la place au président du Malawi à la tête de l'organisation. Tout en qualifiant d'"inutile" le rôle de président de l'UA qu'il a assumé pendant un an.
Dans son discours, juste avant de transmettre le flambeau, Kaddafi s'en est pris au rôle « inutile » du président en exercice de l'UA, « une fonction qui n'a pas de sens pour le moment », selon lui. « Si j'avais su cela, il y a un an, en prenant la présidence, j'aurais refusé. »
Annonçant qu'en tant que « soldat de l'Afrique, il continuera d'assumer ses responsabilités », le "Guide" a donné rendez-vous à ses pairs lors du sommet afro-arabe qui doit se tenir à Tripoli d'ici à la fin de l'année.
Puis, il s'est retiré de la salle après le discours d'acceptation de son successeur, suivi par la demi-douzaine de « rois traditionnels » qui l'accompagnaient. Il avait d'ailleurs donné la parole à leur représentant – un chef de tribu ivoirien - quelques heures auparavant, devant une aréopage de chefs d'Etat amusés.
La cérémonie d'ouverture du sommet des chefs d'Etat s'est terminée vers 15h (heure éthiopienne) avec le lancement de l'année pour la Paix et la sécurité.
Jeuneafrique
- Commentaires textes : Écrire
Msa Ali Djamal : « Sambi réussit mieux chez les moins diplômés »
Le 31/01/2010
Msa Ali Djamal, Sociologue |
Sociologue, Msa Ali Djamal dont ses études portent sur le dévoilement des mécanismes de domination et de la violence symbolique inspirées par la sociologie critique bourdieusienne, nous livre dans cet entretien une analyse sur la situation politique mouvementée qui prévaut aux Comores actuellement. En passant par des explications du vote de décembre dernier, il énonce à travers la notion de « rétrécissement de l’arène politique » forgé par le politiste Juan Linz « un scenario désastreux possible et de probable perduration de l’ordre politique comorien en cas de crise politique. Propos recueillis par Hamidou Saïd Ali, politiste.
Said Ali Hamidou: Des élections législatives ont eu lieu aux Comores, la mouvance présidentielle a pu gagner les votes dans l’ensemble du territoire mais déchu à Mohéli, quel message doit-on retenir ?
Msa Ali Djamal: D’abord, il faut situer le contexte dans lequel ces élections ont eu lieu. Nous sommes dans un contexte où il y a le chômage des jeunes, la déqualification des diplômés, la crise économique, la crise de la représentativité liée au déclin des partis politiques, et le tout sur un fond de crispation insulaire contenu, il ya peu par les institutions de 2001. La victoire de la mouvance présidentielle, Baobab, dont le nom a un sens, chargé d’une symbolique très forte, n’est pas forcement une victoire de Ahmed Abdallah Mohamed Sambi. Ni une adhésion, ni un intérêt pour sa politique, c’est d’ailleurs le contraire qui se confirme. On a vu dans ces élections, trois partis électoraux : le parti de la débrouille, le parti de l’électeur idéologique, et le parti de l’absentéisme.
Ceux qui ont voté, en grande partie les candidats de la mouvance, l’ont fait pour des choix individuels liés aux conditions économiques drastiques, c’est le parti de la débrouille incarné par l’électeur erratique. Dans ce parti, cet électeur introduit dans son comportement électoral un calcul d’utilité. On a vu que Kiki de la république recruté pour faire le sal boulot, n’ayant pas de base sociale solide, a pu envoyer des représentants au parlement avec des pratiques électorales traditionnelles douteuses (libations, distributions d’argent, rastels etc.). Ces pratiques renvoient à une rélégitimation des relations clientélaires qui renforce l’efficacité de la domination sociale sur les comportements du vote.
A côté de cet électeur de la débrouille, Il y a l’électeur idéologique, les séparatistes grands-comoriens et anjouanais. Ces électeurs viennent sur le marché électoral comme des investisseurs avisés, ils apportent leur bulletin pour les candidats de la mouvance, non par adhésion, ni par croyance, ni par sympathies pour les programmes, politiques publiques de Sambi, mais par rejet des institutions de 2001 qui avaient institué comme principes fondamentaux l’égalité républicaine, celle qui consiste à considérer qu’on appartient à un socle commun de valeurs, de droits et de devoirs, que nul grand comorien ne serait supérieur à un citoyen anjouanais , ni un paysan mohélien inférieur à un aristocrate de Mutsamudu. En somme, en donnant leur bulletin à des candidats du Baobab, les électeurs idéologiques pensaient qu’ils auront une vision des programmes visant à restaurer une république aristocratique élective semblable à celle d’Ahmed Abdallah. Leurs choix donc, ne sont pas portés sur les politiques de Sambi, mais sur une anticipation à leur idéologie, la restauration d’une aristocratie élective qui s’oppose au renouvellement des élites. Et le label Baobab correspond bien aux significations qu’ils donnent à cette république pour laquelle ils ont de la nostalgie. La marque Baobab symbolise la pérennité de l’autorité aristocratique, Baobab c’est ce qui perdure, qui résiste aux temporalités historique et politique, qui résistent au temps, au renouvellement, à l’alternance.
Si le choix de l’électeur erratique se fonde sur sa situation personnelle (egotropic vote), celui de l’électeur idéologique se fonde sur la situation idéologique (idéotropic vote). A côté de ces deux électeurs préexistent un autre type d’électeur qui a choisi l’abstention comme moyen d’expression politique. Ce sont les déçus de Sambi, les mécontents, ceux qui avaient rejoint la prophétie Sambiste à la première heure, qui croyaient en lui comme l’homme capable de relever le défi, d’unir les Comoriens, et qui s’en aperçurent très vite qu’ils se sont trompés. Ce sont donc les diplômés, les militants, les cadres et les plus éduqués, qui malgré l’interprétation de Sambi, ils ne se lassent pas des rituels électoraux mais ils voulaient exprimer leur désaccord avec le régime actuel qu’ils pensaient ne pas présager le respect aux règles démocratiques.
C’est dire que Sambi réussit mieux chez les moins diplômés, les plus religieux, plus réceptifs au discours simple et carré qui fait de l’opposition la cause de tous les problèmes que traverse le pays. Ce qui rapproche les électeurs idéologiques aux électeurs erratiques (de la débrouille), c’est une attitude ethnocentriste, valorisant l’entre soi, la culture des hiérarchies insulaires. Les séparatistes grands comoriens sont nombreux à estimer le fait que les institutions de 2001 feront qu’un pouvoir dominant puisse aller à Mohéli est une aberration, et ils ont donné leur confiance à des personnes qui vont prolonger le mandat de Sambi, et dont la finalité est de corriger cette « aberration » et de restaurer une aristocratie élective. Je pense que la seule lecture possible que l’on peut faire sur les résultats, c’est que la victoire de la mouvance présidentielle est la victoire des séparatistes de tout bord qui s’est exprimé le 20 décembre 2009. Et la victoire de ceux qui ont voté les députés de l’opposition, est la victoire de la république. Ce sont des électeurs qui ont introduit dans leur choix une situation politique générale (politropic vote) dont le sens réclame une consolidation de la république qui unit plus qu’elle ne divise, et qui respecte les règles démocratiques plus qu’elle ne les foule au pied.
Le régime Sambi semble tenir, épargner de toute menace, malgré les nombreux échecs et les failles, qu'est-ce qui peut expliquer cette relative stabilité ?
Cette question sous-tend une autre interrogation. De quel soutien dépend la survie d’un régime politique ? La réponse a été donnée par l’hypothèse de l’emprise totale du pouvoir totalitaire sur la société. L’hypothèse qui fait du soutien, un consentement idéologique assumé, soit une adhésion contrainte des individus soumis sur une politique de surveillance et de contrôle permanent. Le régime de Sambi ne tient pas, bien entendu, par la répression, ni par l’oppression et la surveillance mais il repose ou reposait sur une multitude de petits échanges stabilisateurs entre les agents politiques et acteurs sociaux qui pilotent les différents secteurs de la société. Les journalistes, les hommes politiques, les enseignants, les religieux, les notables se livrent en permanence à des échanges de bons procédés, à des micro-négociations qui maintiennent l’ordre politique et la paix sociale. Du coup les agents politiques, de l’opposition, les différents secteurs respectent le contrat tacite selon lequel l’ordre politique repose sur le respect aux règles du jeu « Vous gouvernez aujourd’hui, nous gouvernerons demain ». Il n’est rien donc qui soit plus absolument exigé par le jeu politique que cette adhésion fondamentale au jeu lui-même. Sous peine de s’exclure au jeu et des profits qui s’y acquièrent, tous ceux qui s’engagent dans la politique acceptent ce contrat tacite, de reconnaitre les règles du jeu, de respecter le jeu imposé par une sorte de collusion originaire, c’est tout cela qui tient l’ordre politique, c’est le respect de l’alternance.
Une fois que cette règle est menacée, l’ordre lui-même semble aussi menacé. De cette rupture, naissent des tentatives de contestation pour restaurer l’ordre politique par le respect aux règles du jeu.
Au lendemain de ces élections on a vu le président Azali rompre son silence, comment expliquez-vous ce geste ?
Il est vrai que depuis l’investiture du président Sambi, le colonel Azali se tait. Comme le général De Gaulle, ce qu’il offre ce sont ce silence, cette retraite, sa solitude et un livre « Quand j’étais président ». Cette dimension de l’offre politique a de ceci extraordinaire qu’elle est vierge d’engagement politique, d’interférence politique qui le rend inoffensif et à la fois disponible. Et peut être considéré comme le produit d’une stratégie charismatique. Ce silence là, n’était pas un silence d’indifférence, dit-il lui-même dans sa conférence de presse. Ce silence est plutôt un bien commun politique, un silence stratégique dont la force tient au respect des règles démocratiques ; donc à être inoffensif vis-à-vis du régime eu égard au contrat tacite de non ingérence lié aux échanges de bons procédés dont nous avons parlé un instant.
Depuis la révision constitutionnelle, et au lendemain des élections législatives, le colonel Azali parle et met en avant la singularité de sa personne, de ses prises des positions, des manières de faire de la politique, et il a sans doute plus que d’autres les ressources pour le faire. Le souci du colonel n’est pas de chercher une légitimité qui ne lui est pas vraiment contestée ni de menacer le régime mais de rappeler à l’ordre, à la fois politique et juridique pour épargner le pays de toute crise incontrôlable. Toute l’entreprise azaliste consiste justement à assumer le rôle d’arbitre car il fait état des doutes sur le pouvoir en place, il se place en un homme visionnaire et charismatique qui ne voulait pas parler après un effondrement politique, ni jouer la figure du pompier ni même le rôle de l’alarme d’incendie mais celui de la patrouille de police. En parlant, il se donne une autorité à parler une parole d’autorité parce que de par ses fonctions qu’il a assumées, il se sent investi d’une autorité politique à parler politique avant que l’ordre politique ne soit érodé, c’est au nom de quoi il a rompu son silence afin d’alerter que l’ordre et les règles politiques sont menacés. Ainsi, il voulait rappeler aux parlementaires de veiller au respect de principes démocratiques, condition nécessaire pour la stabilité de l’ordre politique. Il n’a été pas bien compris.
On a vu le régime s’attaquer à Azali. Le colonel constitue t-il vraiment une menace pour le régime ?
Dans une conjoncture de mobilisation des groupes hétérogènes d’opposant, le colonel Azali peut faire figure d’opposant sérieux et donc de recours possible, son autorité politique dont il a bénéficié de sa fonction présidentielle, la réputation de rigueur, d’intransigeance, de discipline, la liaison avec certaines fractions de la haute fonction publique et militaire, son expérience en tant qu’ancien chef des armées, ses réseaux internationaux, ce sont des propriétés retenues, et des ressources imposantes. Il constitue, donc un opposant redoutable du régime dans la simple mesure où il concentre sur sa personne un ensemble de propriétés remarquables au regard de l’activation de nouveaux clivages politiques. Les récits donnés à sa trajectoire en font en tout cas un chef exemplaire, promoteur d’une politique de rigueur et de rémunération presque mensuelle aux fonctionnaires. Affichant son mépris des honneurs temporels, celui de se pérenniser au pouvoir, ses convictions semblent toutes personnelles, attestant par là la sincérité de son combat, il n’a pas hésité de prendre des positions isolées et risquées (ne pas soutenir un candidat de son parti lors des présidentielles de 2006). Azali Assoumani a ainsi largement manifesté cette éthique professionnelle qui est celle de respecter la règle du jeu….
Lors des moments de crise, il a imposé sa posture et sa méthode, en fait la topique de la Mshwara une stratégie de régulation des conflits tandis que Sambi en fait l’affrontement armé sa propre stratégie. Toutes ces dimensions là ne paraissaient pas directement menaçantes dans une condition de retraite politique. Mais en rompant le silence qu’il s’est imposé, cette stratégie semble tout autant risquée, parce qu’il s’agit de délivrer un message, pas n’importe lequel, un message d’autorité énoncé avec autorité dans des formes et rituels d’autorité : « l’ordre politique est menacé, la paix sociale l’est aussi, j’espère que vous serez un deuxième président vivant après moi ». Ce message de rappel à l’ordre n’était pas euphémique mais sensiblement et ostensiblement détaillé et amplifié. Par là, montrant qu’il est un candidat disponible. Mais un candidat qui n’est pas comme les autres constitue une menace pour un régime qui projette de se pérenniser au pouvoir.
En somme, étant d’une figure rare et de ressources imposantes, élu à 52 %, il bénéficie d’un corps électoral non négligeable, et de soutiens diffus mobilisables, certains d’entre eux bien entendu, l’ont peut être abandonné mais d’autres peuvent s’allier à sa cause, surtout les mécontents et les déçus de Sambi, ses relations avec le corps militaire sont tout autant d’indices qui embêtent un peu le régime qui tend à se radicaliser. Le problème c’est qu’en se radicalisant, le régime risque d’entrer dans un engrenage non maîtrisable et de surcroît, dangereux.
Il me semble qu’une crise politique n’est pas à écarter, d’autres parlent même de crise sans l’avoir déjà définie, qu’est ce qu’une crise politique ?
Une crise politique est un état du système social dont les caractéristiques fondamentales est la fluidité conjoncturelle des rapports sociaux affectés dans leur fonctionnement par des processus de mobilisations. Dans une crise, le fonctionnement routinier des secteurs d’activités s’effrite et les logiques spécifiques de ces secteurs s’effacent et remplacées par d’autres qui s’imposent aux acteurs et captent leurs calculs. Delà, une incertitude structurelle arrache les agents sociaux à leurs habitudes et bousculent leurs repères. Une crise politique est aussi un temps de désorganisation et de redéfinition de ressources, c’est aussi le temps où les rapports et les conduites institutionnalisées cessent d’être perçus comme contraignants par les acteurs concernés. En d’autres termes, une crise est une séquence historique où les transactions collusives routinières entre les secteurs et les acteurs fondées sur des pratiques de non ingérence, de reconnaissance mutuelle cessent d’être opérantes et ébranlées par des coups et des tactiques de mise en question mutuelle. En somme, une crise est un moment où le contrat tacite du respect des règles du jeu est rompu et bouleverse profondément le système de pertinences et de références habituelles.
Est-ce que le non respect de mandat par Ahmed Abdallah Sambi débouchera à une crise ?
Oui, en théorie car ne pas respecter le mandat, un des principes des règles du jeu, c’est bousculer le système de pertinences et de références habituelles, c’est modifier les logiques des conduites institutionnalisées. Et Sambi s’apprête à prolonger bien son mandat, la présence supposée de plus de 120 militaires iraniens à Beit-Salam, la révision constitutionnelle, puis la façon dont il s’est arrangé à faire élire l’actuel président de l’Assemblée, un homme vide de ressources dominantes, limité intellectuellement dont sa capacité de direction est ouvertement contestée et contestable, en témoignent. On sait que l’élection est faite en raison des ratés des pratiques collusives et des formes d’indépendance expérimentée durant la première législature des institutions de 2001, sous l’effet conjugué de l’opposition de Dhoifir Bounou contre la loi de la citoyenneté économique.
L’élection inattendue du président actuel de l‘Assemblée, individu relativement peu discipliné va perturber la vie parlementaire et engager des processus de délégitimation de cette institution. C’est dire que les conditions dans lesquelles s’est accomplie la prise en main ou la concentration du pouvoir par Sambi, le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire ( l’affaire Bic Nicom est un exemple éloquent) et le pouvoir médiatique (Le 27 janvier, Alwatwan est allé faire allégeance au nouveau patron de Hamrabat) ne sont pas étrangères au type de stratégie que suivent nombre des régimes non démocratiques pour tenter de conserver leur pouvoir sur le jeu politique… sauf que contrairement à ce qui se passe à Moroni, tant nombre de régimes élisent des personnalités qui tirent leur légitimité sur des ressources incontestables. Mais ici s’ouvre le temps des critiques contre le président de l’Assemblée et le doute de la valeur de ses qualités et ses propres atouts. Donc la crise débouchera non pas seulement sur le non respect du mandat présidentiel. La charge va être portée également sur le terrain législatif qui doit être confié à des personnalités hautement qualifiées et familiarisées avec le maniement des procédures et des règles parlementaires dotées d’une sorte de civilité parlementaire, ce qui n’en est pas chez l’actuel président.
Quels sont les conséquences et les effets d’une crise politique sur l’ordre politique lui-même et sur les acteurs ?
Dans une crise politique, s’imposent aux acteurs des changements stratégiques liés aux déperditions de légitimité et de déstabilisation de réseaux de consolidation. En pareils cas s’opère ce que Linz appelle «le rétrécissement de l’arène politique » à partir duquel une unité sociale donnée peut émerger et acquérir des positions et des ressources inattendues. Ce rétrécissement de l’arène politique a plusieurs conséquences : il impose des négociations secrètes entre les leaders en place et leurs adversaires, ce qui a pour effet de placer hors jeu une large partie des responsables politiques et des parlementaires pro-gouvernementaux. Des intermédiaires extérieurs au jeu routinier sont amenés à y jouer un rôle important. Ils peuvent être issus du pouvoir neutre - militaire, cas Azali, ou des hauts fonctionnaires, cas Djohar.
L’ensemble de ces facteurs contribue à transférer le pouvoir et l’influence parlementaire à une autre arène « invisible » réduit à quelques individus. Une partie de la classe politique peut se retrouver dans une situation de marginalisation ou connaitre une érosion de leur légitimité et d’une perte de leur poids politique.
Le rapport entre les placements et les aspirations peut également être touché et pousse certains à redéfinir les alliances, les concessions, les stratégies d’abandon, d’où la notion de redistribution de carte. La place des négociations est très importante parce que les principes qui la fondent, les marchandages, le débauchage, expliquent la possibilité de l’efficacité de coups de la transgression du secret. Le tout n’exclut pas l’émergence possible de nouveaux leaders charismatiques inattendus.
Propos recueillis par Hamidou Saïd Ali, politiste.
- Commentaires textes : Écrire