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Mayotte : une riposte à la mesure du défi

Le 10/04/2009

 

La réaction d'Idriss Mohamed

Gérant Fondateur de Comores Informatique
www.comoresinformatique.com
Membre du Front Démocratique.
Principal porte-parole du Comité Maoré
Candidat aux présidentielles des Iles 2007
Après la consultation française à Mayotte et les déclarations du Gouvernement comorien tout le monde attendait le discours du Ministre comorien des relations extérieures à la dernière session du Conseil des Ministres de la Commission de l'Océan Indien. Beaucoup applaudirent des deux mains, certains d'une main tandis que d'autres campent dans leur scepticisme.

Et oui quant au fond, les déclarations n'ont guère changées et puis rien de bien concret n'est sorti de la COI. Pire encore, le communiqué parle de simples "divergences" et invite à poursuivre le "dialogue dans un cadre bilatéral". Cependant s'en tenir là revient à nier les évolutions et ne favorise pas l'unité d'action. Car pour la première fois, M Ahmed Jaffar a dénoncé la "politique inamicale" de la France et a osé demander des sanctions contre la France. Ce n'est pas rien. Notons aussi que pour la première fois, une délégation ministérielle française aux Comores n'a pas foulé un tapis rouge ni entendu des you-yous. A ce qu'il semble, personne ne se serait même déplacée à l'aéroport pour l'accueillir. On dit aussi qu'un Vice-Président aurait tancé le Ministre français, que ce dernier se serait fâché en public contre son ambassadeur qui ne l'aurait pas mieux informé sur l'atmosphère qui prévaut aux Comores, etc.

Des actes significatifs qui témoignent du changement d'attitude des autorités du pays, des actes qui tempèrent s'il le fallait le déploiement de l'armée place de l'indépendance le 4 avril dernier, déploiement qui finalement ne visait pas la manifestation prévue par le Comité Maore mais se proposait de sécuriser le rassemblement face à des groupes para-militaires composés d'anciens GP, fiers enfants de Bob Denard, qui menaçaient de créer des troubles.

La vraie question concerne la suite et tout le monde est concerné. Les partis politiques qui brillent par leur absence, qui traînent les pieds face aux initiative des Organisations de la société civile, les plus actifs se contentant de quelques déclarations. Les Exécutifs des Iles qui donnent l'impression de ne pas être directement concernés et qui se laissent enfermer dans ce "conflit de compétences" sans fin.

Le gouvernement comorien qui semble tanguer et dont on attend qu'il se dote enfin d'une politique systématique de défense de l'unité de l'Archipel, politique devant s'articuler autour 1) du refus d'accueillir les déplacés de Mayotte, 2) d'une mobilisation par le biais d'une réunion à Moroni, du Comité des 7 de l'Union Africaine afin de saisir le Conseil de Sécurité de l'ONU et marquer ainsi la fin d'un dialogue bilatéral stérile, 3) de la saisine de la Cour Pénale Internationale contre la France pour déplacement forcé de population et contre Balladur pour crime contre l'Humanité et 4) de la constitution d'une structure de large front uni qui porterait cette politique, soulagerait le Gouvernement et montrerait au monde que les Comores unies comme un seul homme ne capituleront jamais sur la question de l'île comorienne de Mayotte et sont décidées à relever le défi arrogant de la France.



 

Sambi, Mohéli et la communauté internationale

Le 10/04/2009

 
Le Courrier de Mohamed Inoussa
Journaliste et Chroniqueur

Que pense la communauté internationale du projet de révision constitutionnelle du chef de l’Etat ? Cette question, combien de Comoriens ne se l’ont-ils pas posée. Légitime question quand on sait l’attachement proclamé de ce « machin » au droit et aux principes.

Selon des sources dignes de foi, le président tanzanien Kikwete, en visite récemment à Moroni, ne s’est pas privé de mettre en garde le président Sambi contre toute tentative de jouer les prolongations à Beit-salam. Et non content de la réponse de son interlocuteur, toujours prêt à sortir des justifications parfois tirées par les cheveux, Kikwete a fait part au public, à Mohéli, de la position officielle de l’Union Africaine, dont il était le président sortant : pas de prolongation de mandat du président de l’Union au-delà de 2010.


L’argument du président tanzanien est imparable : S’il a accepté de fournir des soldats à Sambi en mars 2008, c’est pour déloger un président qui, malgré la fin de son mandat, a refusé de partir et a tenté de s’accrocher au pouvoir. Ainsi, au risque de paraître « ridicule » et illogique aux yeux de la communauté internationale, il ne saurait aucunement cautionner une démarche similaire, quoi qu’aujourd’hui habillée d’un référendum dont on sait les résultats à l’avance.

La Francophonie vient de dépêcher un envoyé spécial à Moroni, en la personne du professeur André Salifou qui aurait, dit-on, transmis le même message de fermeté au président Sambi.

Hier, à Beit-salam, la délégation de Mohéli ne s’empêchait pas de déclarer à la presse que si la tournante ne tourne pas en 2010, l’île se détachera de la République. Rien de moins. Simple menace pour forcer la main de Sambi ou risque réel de balkanisation de l’archipel.

Selon l’argumentation d’un membre éminent de cette délégation, il suffira que le Non l’emporte à Mohéli (ce qui paraît sûr) et ils se saisiront de ce vote, comme Mayotte en 1974, pour prendre le large. « Les Anjouanais réussiront à vous tromper, vous les Grand-Comoriens, pas nous les Mohéliens » a-t-il ajouté, à l’adresse d’un groupe de journalistes (de Ngazidja). Propos très dur, à la limite raciste, mais qui en dit long sur le risque d’une résurgence de la crise séparatiste à Mohéli.

 

Pourquoi faire de Mayotte le 101e département français ?

Le 31/03/2009

 
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Les Mahorais se sont prononcés dimanche en faveur de la départementalisation de

leur territoire. Explications sur la réforme et ses conséquences régionales.

 

 

Il fut un temps où l'on parlait de « sens de l'histoire », et celui-ci allait dans la direction de la décolonisation. A Mayotte, petit territoire volcanique de l'Océan indien, il souffle ce dimanche dans le sens inverse, celui de la recolonisation.

La population de Mayotte (71 000 électeurs) s'est en effet massivement prononcée par référendum dimanche en faveur de la proposition de devenir le cinquième département français d'outre-mer (rejoignant La Réunion, La Guadeloupe, la Martinique et la Guyane) et le 101e département français. D'après les résultats de bureaux-tests rapportés par l'AFP, le Oui l'emporterait avec 92,67 % des
voix. Le taux de participation s'élèverait à 58,81%.

La réponse des 180 000 habitants ne faisait guère de doutes, toutes les forces politiques locales, y compris le parti communiste, faisant campagne pour le « oui », ancrant ainsi durablement Mayotte dans la République.

Cette belle unanimité ne doit pas empêcher de se poser des questions sur lesquelles la population métropolitaine est peu informée, et pas consultée.

Le poids de l'histoire

Mayotte a été la première des îles comoriennes à devenir française :  dès 1841 (il faudra encore un demi-siècle pour que le reste de l'archipel passe sous le giron français). Puis, pendant un siècle, la France a traité Mayotte comme une des quatre îles de l'archipel des Comores (avec la Grande Comore, Anjouan, et Moheli), avec un statut de protectorat puis de territoire d'outre-mer.

Mais en 1974, lors du référendum d'autodétermination organisé dans l'archipel, Mayotte vote seule à 64% pour rester française alors que les trois autres îles choisissent massivement l'indépendance.

Valéry Giscard d'Estaing, alors président, décide de la séparer de ses trois « soeurs », allant à l'encontre des principes internationaux qui militent pour le respect des frontières héritées de la colonisation.

Des Comores indépendantes, mais « à trois pattes », sans Mayotte

Cette décision historique vaut à la France des condamnations régulières aux Nations unies :  la résolution 3385 du 12 novembre 1975 affirme ainsi « la nécessité de respecter l'unité et l'intégrité territoriale de l'archipel des Comores, composées des îles d'Anjouan, de la Grande-Comore, de Mayotte et de Mohéli ».

Même réaction de la part de L''Union africaine, qui est basée sur ce principe de l'intangibilité des frontières, et verrait un profond et tragique remodelage de la carte de l'Afrique si elle acceptait de revenir sur cette règle.

En plus de trente ans de séparation, le fossé entre Mayotte restée française, et les Comores indépendantes « à trois pattes » comme disent les Comoriens, n'a cessé de se creuser.

Les Comores font partie des pays les plus pauvres du monde, alors que Mayotte, en tant que « collectivté départementale » française, bénéficiait d'un niveau de vie plus élevé garanti par la « mère patrie » française.

Les barbouzeries de Bob Denard, épisode peu glorieux

Ces années-là furent également celles de la déstabilisation des Comores par les mercenaires conduits par Bob Denard, l'un des épisodes les plus incongrus mais détestables de l'ère post-coloniale et barbouzarde française en Afrique.

Bob Denard, parfois en service commandé par Paris, parfois pour son propre compte, a même pris le contrôle des Comores dans les années 80, sous le nom de Saïd Mustapha Mahdjoub !

Après des décennies d'instabilité, qui ont vu tour à tour certaines des îles prendre le large, comme Anjouan l'an dernier jusqu'à l'intervention des forces de l'Union africaine, les Comores sont redevenues un Etat unifié, mais pauvre :  ses seules ressources sont l'ylang-ylang, une huile utilisée en parfumerie, la vanille, et les mandats de l'importante diaspora comorienne, notamment à Marseille, première « ville comorienne » avec une communauté estimée à quelque 50 000 personnes...

Le fossé avec les autres îles des Comores

Le décalage n'a cessé de croître avec Mayotte, qui bénéficie de certains avantages liés à la présence française, notamment en termes de système de santé et d'éducation, attirant un flot continu d'immigration comorienne attirée par des prestations sociales supérieures.

Avec le durcissement des politiques métropolitaines d'immigration, et la lutte contre l'immigration clandestine, Mayotte est devenu une véritable « ligne de front », avec tous ses drames et ses dérapages.

Des milliers de Comoriens -7 000 depuis quinze ans, selon des estimations- ont en effet perdu la vie en tentant de passer à Mayotte, lorsque leurs embarcations de fortune, les fameux « kwassa kwassa », font naufrage. Des morts dans l'indifférence totale d'une métropole distante de 8 000 kilomètres.

Sur 26 000 expulsions revendiquées, 16 000 concernent la seule Mayotte !

Quant à ceux qui parviennent à bon port, ils sont massivement expulsés :  16 000 expulsions de Mayotte en 2008, à comparer avec les 26 000 reconduites à la frontière en métropole comptabilisées la même année par le ministère de l'Immigration.

Non sans passer par l'un des plus infâmes Centres de rétention de la République :  cette vidéo diffusée il y a trois mois par nos confrères de Libération en est l'un des témoignages les plus forts. Là encore, émotion pendant quelques minutes en métropole, puis retour à l'indifférence.

Dans Libération, un agent de la police de l'air et des frontières (PAF) avait témoigné : 

« Les conditions de rétention des sans-papiers sont indignes, dit-il. Les gens sont traités comme des animaux. Et nous, on a la pression de la hiérarchie pour faire notre boulot sans rien dire. L'objectif, c'est de répondre aux attentes du ministère. »

Des sans-papiers d'un type un peu spécial puisqu'ils sont les cousins des Mahorais, et que la libre circulation entre les îles a existé pendant des siècles, et n'a été progressivement interdite qu'avec la présence française à Mayotte.

La départementalisation, solution miracle ?

Pourquoi cette départementalisation de Mayotte ? Pour tenir une promesse faite aux Mahorais, répond le gouvernement.

Et, de fait, on voit bien que l'ensemble des acteurs politiques de l'île y sont favorables, pour des raisons évidentes :  entre la misère et l'incohérence politique des Comores, et la prospérité relative et les institutions républicaines, il n'y a pas photo.

Mais comment gérer les conséquences de cette décision ?

Elle coule dans le bronze le choix contesté de 1975 de séparer l'archipel des Comores, et accentue le décalage régional entre les départements français de La Réunion et de Mayotte, et une région qui se débat dans d'inextricables problèmes de développement et de stabilité politique, comme viennent de le montrer les derniers développements à Madagascar.

Rendre Mayotte aux Comores serait arbitraire et antidémocratique

Aucun homme politique, Mahorais ou métropolitain, n'a de réponse à cette question. Tous savent pourtant qu'elle ne disparaîtra pas comme par enchantement vu le décalage croissant qui va découler de la départementalisation, conduisant à d'inévitables drames et à des politiques de contrôle de moins en moins humaines.

L'alternative, qui serait de « rendre » Mayotte aux Comores contre la volonté des Mahorais serait tout aussi arbitraire et antidémocratique.

Le piège créé par Giscard en 1974 se referme aujourd'hui. Seule une politique régionale cohérente, qui permettrait de codévelopper la région en harmonie et pas en érigeant des murs de Berlin impossibles en haute mer, serait de nature à éviter les tragédies qui s'annoncent. Mais elle n'est pas sur la table, pas même réaliste en l'état.

Au coeur de la crise économique et sociale, il est clair que l'enjeu est minime vu de métropole. On a cependant bien vu récemment avec la Guadeloupe que les « confettis de l'empire », pour reprendre la formule de Jean-Claude Guillebaud, savent se rappeler au bon souvenir de leurs « maîtres » de temps en temps...

En attendant, en l'absence de vrai débat, comme le soulignait Jean-Louis Le Moing, membre d'une mission du PCF revenue très critique d'un voyage à Mayotte : 

« Les Français vont découvrir que la France s'agrandit lors du JT de 20 heures »...

Le sens de l'histoire, décidément, ne sait plus où il en est.

 

Le président Sambi reçoit les honneurs de Special Olympic

Le 23/03/2009

le docteur Ali Shawahin respectivement P/R et Directeur Mena et Sambi
le docteur Ali Shawahin respectivement P/R et Directeur Mena et Sambi 
L’ingénieur Aymane Abdouloihab et le docteur Ali Shawahin respectivement Président régional et Directeur des programmes Special Olympic du Moyen orient et d’Afrique du Nord (Mena) ont effectué, le week-end dernier, une visite de travail à Moroni.

Le but de ce déplacement à Moroni est de rendre hommage au président A.A Mohamed Sambi suite à la participation des Comoriens aux précédents Jeux spéciaux handicapés et d’officialiser l’affiliation des Comores au Special Olympic Mena, a précisé le président de Special Olympic des Comores, Mohamed Said Mfoihaya. Au palais Beit Salam, le chef de l’Etat a reçu, des deux émissaires, un tableau qui porte son nom et le logo du Special olympic.

La délégation a été reçue, par ailleurs, par le vice-président Ikililou Dhoinine avant d’être accueillie au Mirex. “Désormais, l’Union des Comores est officiellement membre Special Olympic et pourra participer dans toutes les activités sportives, éducatives et bénéficier des aides humanitaires de l’organisation”, a déclaré le président du Special olympic Mena. Pour sa part, le président Sambi s’est engagé à “soutenir les handicapés comoriens” après avoir “rappelé” que “la première dame, Hadjira est la présidente d’honneur du Spécial Olympic des Comors”. Après la cérémonie le chef de l’Etat a révélé qu’un siège allait être bientôt mis à la disposition de Special olympic Comores.

Une visite de travail initialement prévue en septembre prochain sera anticipée, au regard des prestations des handicapés comoriens aux précédents jeux spéciaux régionaux et mondiaux. On se souvient qu’aux jeux d’Abu Dhabi 2008 à Idaho et Boise aux Etats-Unis en 2009, les Comores ont marqué leur première participation par cinq médailles dont deux en or.

Avant leur départ de Moroni, les deux visiteurs ont été accueillis, hier matin, à l’Institut National de la Jeunesse et des sports à Moroni par les handisports, leur coach, Aboubacar Soundi et la direction nationale de la solidarité. “Nous avons voulu leur témoigner notre reconnaissance à l’attachement dont ils ont fait preuve à l’égard de notre pays et de nos athlètes handicapés”, a dit Aboubacar Soundi.


Elie-Dine Djouma

 

Plaidoyer pour la non départementalisation de Mayotte

Le 23/03/2009

Marcel Séjour, Cuisinier, Prof d'Anglais, Coach de foot et peintre pro
Marcel Séjour, Cuisinier, Prof d'Anglais, Coach de foot et peintre pro 
La pertinence autant que l'impertinence de ses propos sur son blog nous ont fait demander à Marcel Séjour de nous dire ce qu'il pense du projet de départementalisation de Mayotte. Lui même s'interroge sur la « légitimité » qu'il a à « parler au nom de Mayotte ». Arrivé à la soixantaine, Marcel Séjour est à Mayotte depuis 1993. C'est à dire qu'il aura passé plus d'années à Mayotte que certains mahorais expatriés à la Réunion ou en métropole qui s'exprimeront dimanche prochain par procuration. De plus, il a fait le choix de Mayotte en venant construire sa vie ici. Cela nous semble suffisant, en plus du fait qu'il est... français comme tous les électeurs qui vivent à Mayotte et voteront le 29 mars. Ce n'est pas un politique, ce n'est pas un décideur, mais un citoyen « lambda » qui s'interroge sur ce statut et les répercussions auxquelles il peut s'attendre dans sa vie quotidienne, mais aussi dans celle de ses voisins, de ses amis qui n'ont pas la même couleur mais qui partagent le même destin, les mêmes inquiétudes.

Il n'est pas un parent respectable qui ne souhaite pour ses enfants un avenir meilleur que celui vécu par les générations précédentes, c'est-à-dire une vie prospère et sécurisée. Lorsqu'on leur a demandé de choisir entre l'indépendance et le maintien dans la République les parents mahorais des années 70 se sont comportés comme tous les parents du monde : ils ont évalué ce qui leur semblait le plus prometteur, et, à choisir entre le mzungu puissant, dominateur et riche et le cousin bavard, dominateur et fauché, ils n'ont pas hésité. L'avenir de leurs enfants passerait par la France. Elle seule pouvait garantir les équipements collectifs, la stabilité sociale, la santé, et surtout l'éducation sans laquelle il n'est pas possible d'abandonner définitivement la précarité et sa sœur la servitude. Le choix fait par les anciens et surtout les anciennes de Mayotte était parfaitement justifié, raisonnable et légitime et il n'est assurément pas question, et à aucun moment, de le remettre en cause.

Mais la question qui va être posée aux habitants de Mayotte dimanche prochain n'est pas la même que celle qui fut posée en 1974 ; elle implique donc une réponse ou à tout le moins une réflexion différente et ceci pour deux raisons aussi fondamentales l'une que l'autre.

Les temps changent

En 1974 la France était la quatrième puissance de la planète ; aujourd'hui elle est la septième ; demain elle sera la neuvième puis la dixième puis la onzième et ainsi de suite ; dans un bref avenir elle ira, avec ses soixante petits millions d'habitants, grossir la masse informe des anonymes puissances dites « moyennes » , chose inconcevable par nos parents. C'est d'ailleurs tout l'Occident qui glisse de son piédestal de leader. La grande crise aidant, les nouveaux équilibres économiques et donc stratégiques sont en train de se réorganiser autour de puissances autrefois « émergentes ». En abandonnant l'Irak, en parlant à nouveau avec l'Iran, en avouant ne pas gagner la guerre en Afghanistan ni d'être en mesure d'y parvenir, les Etats-Unis de Barak Obama admettent que l'idée de l'Empire américain a pris fin, que l'Amérique ne dominera ni ne policera le monde et se contentera d'être une grande puissance parmi d'autres grandes puissances, à égalité peut-être, à couteaux tirés surement avec la Chine, l'Inde, le Brésil, la Russie ou l'Indonésie. Le déclin de la France et de toutes les nations européennes est donc inévitable, tout comme seront inévitables le recentrage des populations européennes sur le « territoire national » et la montée des radicalismes.

Dans ce monde nouveau quelle sera la meilleure place pour Mayotte ? Et comment y accéder ?

La deuxième grosse différence d'avec le référendum de 1974 c'est que la question alors posée était beaucoup plus dramatique que celle du 29 mars. En effet on demandait alors aux parents mahorais de choisir entre être français ou ne pas l'être. Si tu votes oui tu es français, si tu votes non tu ne l'es plus. Il s'agissait d'un dilemme, ce que la consultation du 29 mars n'est pas. Aujourd'hui les Mahorais n'ont pas le couteau sous la gorge, et quelle que soit leur réponse ils passeront d'un accommodement avec l'Etat à un autre accommodement avec le même Etat, pas d'une citoyenneté à une autre. Dire NON au département n'est pas quitter la République mais dialoguer avec elle. Bien sûr personne ne sera surpris si le OUI l'emporte mais le NON est prévu comme une possibilité par la République elle-même puisque la question est posée.

La conclusion qu'imposent ces différences fondamentales d'avec 1974 c'est que dire OUI au département n'est pas une obligation de survie, que ce n'est donc pas la seule réponse possible, qu'il existe une autre hypothèse de travail, une autre façon d'imaginer l'avenir de Mayotte, qui n'était pas envisageable du temps de nos parents et que ce n'est pas manquer de respect à l'égard des anciens mais bien au contraire les traiter avec tout le respect qui leur est dû que de chercher, aujourd'hui comme hier quelle réponse est porteuse des meilleurs espoirs pour les générations qui arrivent.

Qu'elle soit en faveur du OUI ou qu'elle soit en faveur du NON, l'argumentation peut être circonscrite à trois grands chapitres, lesquels correspondent aux trois principes fondateurs de la Nation française post révolutionnaire, à savoir Liberté, Égalité, Fraternité. Les Mahorais, les Mahoraises surtout, ne s'y sont pas trompés, qui ont pris le premier de nos grands principes, Liberté, comme justification nécessaire et totalement suffisante à la sécession de Mayotte. « Nous voulons être français pour être libres ». C'est donc par la Liberté que nous terminerons, lui donnant le mot de la fin.

Fraternité républicaine

Depuis que Ségolène l'a chanté dans un palais des sports le mot fraternité a tendance à faire sourire ; on parle ainsi désormais de solidarité nationale, voire de solidarité républicaine.

L'expression, vidée de toute sensiblerie, évoque une cohésion quasiment instantanée des français dans leur ensemble aussitôt qu'un des leurs est frappé par le sort, un élan irrésistible de solidarité engagé, encouragé, orchestré par les plus hautes instances du pays, garantes d'une efficacité sans faille, qui va venir en aide aux plus démunis avec l'argent que vont lui donner de bon cœur et avec le sourire ceux qui en ont plus qu'il ne leur est nécessaire ; la toute première conséquence d'un OUI au département sera de mettre en branle cette désormais fameuse « solidarité républicaine », celle qui consiste à répartir les richesses de façon un peu plus humainement satisfaisante, de prendre aux riches pour donner aux pauvres, d'ouvrir en grand les portes à ce qui n'est accessible qu'aux départements et aux seuls départements, c'est-à-dire les subventions et allocations d'un côté et les impôts et taxes de l'autre, Ce qui est donné et ce qui est repris. On nous donnera un peu plus. Sans doute. Et on nous prendra un peu plus. Sans aucun doute.

Tout consiste donc à savoir si nous y gagnerons ou non. Des experts très qualifiés nous expliquent que les subventions et allocations dépasseront très largement les impôts exigés, impôts que les Mahorais ne paieront pas puisque leurs revenus sont trop faibles. A quoi d'autres experts tout aussi qualifiés répondent que les impôts locaux, tels les ordures ménagères, ou la taxe foncière sont payables sitôt qu'on est locataire ou propriétaire, même si on n'a pas de revenu et que les allocations diverses seront largement érodées par un net accroissement du coût de la vie. Difficile de s'y retrouver.

La seule chose dont on soit absolument certain c'est que si Mayotte devient département elle vivra au rythme des autres départements. Il suffit donc d'étudier ce qui s'est fait en France depuis les dix dernières années pour deviner ce qui va très probablement arriver à Mayotte. Or on constate que le niveau de vie général des métropolitains n'a pas beaucoup augmenté mais qu'au contraire il a souvent baissé, que le pouvoir d'achat n'est plus ce qu'il était, que les allocations et subventions diverses sont en nette diminution et de plus en plus difficiles à obtenir pour un nombre de gens de plus en plus restreint, que les acquis sociaux partent les uns après les autres, que les inégalités sont de plus en plus criantes, que la précarité devient la règle générale et que chômage et délocalisation sont les deux flasques mamelles de la société qui s'annonce ; DES sociétés qui s'annoncent, doit-on dire car la France n'est pas la seule dans ce cas. Toutes les nations européennes sont concernées. Si tout cela se passe en France, si la crise y sévit, si la précarité s'installe, si le nombre des miséreux augmente, pour quelle raison Mayotte, département français, connaitrait-elle un sort différent ?

Sitôt devenue département Mayotte recevra plus d'argent !

Peut-être mais pas tout de suite et comme tous les autres départements elle n'en aura pas beaucoup parce que les temps sont durs n'est-ce pas, parce que c'est la crise, parce que les caisses sont vides, parce qu'on a déjà donné, parce que tout se traite à Paris et qu'il faut donc en référer à Paris, parce qu'il y a un nouveau ministre, comme vous le savez, qu'il ne connaît pas encore le dossier, comme vous vous en doutez mais il va l'étudier, très bientôt, faites-lui confiance, et il rendra ses conclusions très bientôt, prochainement même, parce qu'on ne peut pas aller trop vite voyons voyons, que certaines étapes doivent être atteintes avant d'autres, l'inverse est vrai aussi, parce qu'il faut laisser du temps au temps et ne pas mettre la charrue avant les bœufs, ah ! les beaux grands bœufs du grand Chirac ! et pour tout un tas d'autres raisons aussi bonnes les unes que les autres, raisons que les Français de métropole et de Mayotte ont déjà toutes entendues mille et une fois et il n'y a pas de raison pour que ça change puisque la crise est là, qu'elle est bien là et que nous nous en sortirons, ça c'est sur, nos dirigeants nous l'affirment mais ça va prendre du temps et pour s'en sortir il faudra se serrer les coudes, serrer les dents et probablement serrer aussi les fesses. Il n'est d'ailleurs pas besoin d'être département pour attendre les sous puisque notre bon vieil état providence a déjà prévu que le RMI, ou le RSA, ou ce qu'il s'appellera dans dix ans ne serait versé à Mayotte dans son intégralité que dans dix ans justement. Il n'est pas prévu par contre que la fiscalité ait besoin de dix ans pour se mettre au goût et à l'heure de l'hexagone. Bref, que du bonheur. Et Bruxelles fera aussi partie de la fête, qui insistera pour verser son obole aux tout frais départementalisés, soyez les bienvenus dans le cercle de l'Europe, nous vous attendions, enfin vous voilà, vous faut-il des routes, des ponts, une piste longue ? Ne vous inquiétez plus de rien nous nous occupons de tout.

C'est quoi ce délire ?

Par la maîtrise des rouages administratifs qu'elle suppose la départementalisation profitera d'abord, et presqu'exclusivement à ceux qui ont l'habitude du pouvoir politique ou/et économique, soit 80% des créoles catholiques et 10% des noirs musulmans, c'est-à-dire à peu près 15% de la population ; au grand maximum. Ça c'est de la démocratie qu'elle est bonne ! Et il n'y a aucune chance pour que ça s'arrange puisque dans le monde entier les richesses sont de plus en plus concentrées dans les mains de moins en moins de gens. Crise après crise, défaillance après défaillance la prospérité de la France ne se conjugue désormais plus qu'au passé.

Jamais plus la France ne redistribuera autant de richesses que celles dont elle disposait jusqu'à la fin des trente glorieuses.

Ce destin est non seulement inéluctable mais il est sans retour possible. Jamais on n'a vu un Empire s'écrouler puis revenir à sa gloire première. Le sort de l'Occident est donc scellé. L'Occident va tomber, ça on le sait. Quand ? Ca on ne sait pas. C'est Dieu qui sait. La chute de Rome a pris deux siècles ; celle du Pékin impérial n'a pris que quelques mois mais ce qu'on sait à Mayotte, et ce à quoi nos enfants devraient être préparés, c'est que suivre le Blanc là où il va n'est plus aussi rassurant qu'avant et nous avons le droit, ici, à Mayotte et petits comme nous sommes, d'essayer de doubler nos chances. Quel est l'intérêt de s'attacher pieds et poings liés au sort d'un géant qui s'effondre ? Ancrer aujourd'hui son destin à celui de la France c'est prendre en marche un train qui ralentit et va bientôt s'arrêter. En disant OUI au département Mayotte met tous ses œufs dans un seul panier ; celui du mzungu. C'est ça la sagesse mahoraise ? C'est ça que les anciens souhaitaient pour leurs enfants ?

Egalité républicaine.

La deuxième raison pour laquelle on conseille de voter OUI c'est que lorsque Mayotte sera enfin érigée au rang de département « pur et dur » rien ne distinguera plus les Français de Mayotte de ceux de métropole. C'est un argument essentiel des tenants du OUI que de souligner que Mayotte sera désormais l'égale de n'importe quel autre département républicain. Cette question de l'égalité est d'une grande importance pour les Français, beaucoup plus que pour les Anglais par exemple, et elle est considérable pour les Mahorais puisqu'en effet, si ces derniers demandent si souvent et avec tant d'insistance d'être traités en égal c'est bien parce qu'ils ont la certitude de n'avoir jamais été considérés comme tels, ni par les Comoriens ni par les wazungu. On aurait grand tort de ne voir là que caprice ou enfantillage puisque cette crainte de l'inégalité est constitutive de la psychologie mahoraise, que son installation remonte aux lointaines années de sujétion à leurs arrogants cousins, suivies des années de colonisation et de domination blanche, pas si lointaines que ça celles là, que cette crainte, qu'on appelle souvent « complexe d'infériorité » est devenue un archétype et que, comme tel, rien ne pourra plus le déloger de la psyché locale sauf à rompre avec le blanc, de façon définitive et pendant plusieurs générations. Nous n'en sommes pas encore là et il faut donc, pour les Mahorais, s'en accommoder. Etre traité de façon égale est une très bonne façon de faire taire cette crainte permanente et l'accès de Mayotte au rang de département « pur et dur » offre l'espoir, sinon la garantie d'être inscrit dans un espace républicain où le mot Egalité est un mot fondateur donc rassurant ; et si cela ne suffisait pas, sitôt que Mayotte sera département « pur et dur » les Mahorais auraient alors le droit d'exiger d'être traités en égal avec les métropolitains, ce que les Mahorais n'ont jamais fait jusque là et qui n'augure pas d'une harmonie apaisée entre les wazungu et les autochtones. Cet argument en faveur du OUI est un argument si fondamental qu'il ne peut absolument pas être écarté, et personne ne peut donner tort aux Mahorais, le métropolitain moins qu'aucun autre puisqu'il a, par sa longue domination et par l'usage intensif du vocable « égalité », créé et activement contribué à entretenir le terreau même des revendications qui s'annoncent.

Pour attirante et légitime qu'elle soit cette revendication d'égalité est pernicieuse pour deux raisons.

La première c'est qu'à force de réclamer l'égalité de traitement dans tous les domaines les Mahorais vont voir, voient déjà, peu à peu disparaître toutes les petites libertés qui façonnent leur vie depuis toujours sans pour autant avoir aucune chance de disposer de tous ces biens dont les « vrais » Français disposent. La justice cadiale, pour ne citer qu'elle, est devenue un archaïsme intempestif dont Mayotte doit se passer, reléguant l'enseignement de l'Islam au rang de coutume régionale et vaguement folklorique qu'on tolère mais dont on ne tient plus compte. On tolérera les Debba, on les encouragera même parce qu'il n'y a que des femmes, toutes pomponnées et parfumées et qui chantent bien en battant des mains et c'est si tellement authentique, si tellement vrai, si indubitablement folklorique qu'on les rassemblera bientôt dans un stade les jours d'escale de gros bateaux remplis de troisième âge cacochymes et libidineux, alors que dans les mêmes moments on demandera au Muezzin d'arrêter ses appels à la prière à quatre heures du matin parce que ce n'est pas républicain. Ce n'est plus d'égalité mais d'uniformisation qu'il faudra parler et lorsqu'il aura l'argent pour ce faire, ce qui n'est pas demain la veille, le Conseil Général fera venir à grands frais des plaques de faux marbre ou des dalles de grès reconstitué pour construire un centre piétonnier qui ressemblera à s'y méprendre aux plateaux piétonniers d'Angers de Valence ou de Trèves.

Désespérant.

En outre on ne saura jamais de quelle égalité on parle. Dieu a créé les hommes égaux entre eux mais, ainsi que le faisait remarquer Coluche, certains sont plus égaux que d'autres. Ainsi lorsque la pure et dure Mayotte sera l'égale de n'importe lequel des départements français de quel département sera-t-elle plus particulièrement l'égale ? Du Pas de Calais ou des Hauts de Seine ? Mamoudzou sera-t-elle l'égale de Neuilly ou celle de Gandrange ? Qui parierait sur Neuilly ?

La seconde raison de se méfier, plus insidieuse et plus destructrice c'est que celui qui passe son temps à réclamer l'égalité se maintient dans la position de demandeur, confirmant ainsi à son interlocuteur qu'il n'est pas son égal et les wazungu n'ont pas besoin de ça pour croire qu'ils sont supérieurs. Ils vont donc se trouver confortés dans leur position dominante, celle de ceux qui octroient, avec plus ou moins de bonne grâce, face à ceux qui quémandent, avec plus ou moins d'insistance. Si égalité il y a elle aura été accordée par le dominant, qui en attendra nécessairement de la gratitude. C'est pas gagné. D'un côté nous aurons les « je donne- t'es jamais content » et de l'autre les « je veux-y a jamais assez ». Déjà tendues et pas franchement satisfaisantes les relations entre les Mahorais et les wazungu vont devenir exécrables. On peut vivre avec, sans doute, mais on peut aussi essayer de ne pas envenimer les choses et même de tourner l'inégalité à notre profit. Ce qui est tout à fait possible.

Dans un couple, ou simplement dans n'importe quelle relation entre deux personnes celui qui a le vrai pouvoir c'est celui qui dispose du pouvoir de dire non. Celui qui dit oui acquiesce à une initiative qui vient de l'autre ; celui qui dit non impose qu'une autre initiative soit proposée. Si, comme tout le monde s'y attend, à Mamoudzou comme à Paris, Mayotte vote OUI elle n'aura plus qu'à attendre que le mzungu décide à quelle sauce et à quelle vitesse elle sera mangée. Le mzungu dira alors : » Bon, puisque vous avez dit OUI vous faites ce qu'on vous dit. » Si au contraire Mayotte votait NON la surprise serait totale et le mzungu n'imposerait plus mais demanderait. « Bon, nous sommes surpris mais c'est comme ça ; maintenant vous voulez quoi ? »

Alors, et alors seulement le Mahorais serait un peu plus l'égal du mzungu puisque son avis serait demandé !

Liberté républicaine

La troisième raison pour laquelle un OUI serait intéressant c'est qu'en ancrant de façon aussi irrévocable Mayotte dans la trame républicaine on la sépare, de façon tout aussi irrévocable de ses caractériels cousins et insolents voisins, et là encore l'argument n'est pas mince puisque ce fut très exactement le premier argument qui conduisit Mayotte, en 1974, à refuser l'indépendance. « Nous voulons être français parce que nous voulons être libres ! » Libres des Comoriens bien évidemment. Que peut-on bien trouver à y répondre ? Il n'existe pas cinquante façons de se libérer d'un despote ; on peut le maintenir à distance et ne plus rien avoir à faire avec lui ; on peut s'en différencier au point que ses prétentions deviennent ridicules et donc inaudibles. De ce fait, et par essence pourrait-on dire, l'accès au statut de département va avoir l'immense avantage de signifier aux Tartarins d'à côté qu'à partir de maintenant ils ne s'adressent plus à des descendants de leurs serfs mais à des Français libres et égaux en droit, que toute revendication sur Mayotte est assimilable à une insulte faite à un état souverain, que tout acte malveillant peut être considéré comme une agression, voire un casus belli et qu'ici on s'attend en toute logique à ce que le président du Conseil Général, s'il se déplace à Moroni, soit reçu avec les égards et la pompe dus à un ambassadeur. Avant c'étaient eux qui se la pétaient ; maintenant c'est Mayotte qui biche. Chacun son tour et c'est très bien comme ça. Les wazungu ont même un proverbe pour illustrer le phénomène, où l'on parle d'assiette au beurre qui passe pour tout le monde. Eh bien l'assiette au beurre, en ce moment, elle est devant Mayotte. A bon entendeur ! Le temps passé est bel et bien passé, une page est définitivement tournée, il n'est pas question de revenir là-dessus et jamais, vous entendez, JAMAIS Mayotte ne reviendra dans les Comores !

A quoi le Sage répond que dès qu'on parle d'avenir il ne faut jamais dire jamais ; à moins bien sur d'ajouter « Inch'Allah », ce que les plus dévots des défenseurs du OUI oublient toujours de faire.

« Il est très difficile de prévoir quoi que ce soit, et surtout l'avenir » disait Oscar Wilde et il avait bien raison. L'avenir est en effet plein de surprises et ce n'est pas être fou que d'envisager toutes les hypothèses possibles et préparer ainsi, pour ses enfants, un monde où ils pourront vivre libres et en paix. Nos anciens ont choisi la France parce qu'ils voulaient rester libres. Mayotte est française, elle restera donc libre. Le statut de département amènera des contraintes nouvelles mais ne fournira aucune garantie supplémentaire. L'Algérie était constituée de cinq, puis quatorze départements jusqu'aux accords d'Evian. A la suite desquels les quatorze départements ont disparu laissant deux millions de pieds noirs battant de l'aile et claquant du bec sans que leur détresse n'émeuvent quiconque ni ne change quoi que ce soit. Si, pour des raisons qui sont les siennes la France utilisait son droit du plus fort, et décidait d'abandonner Mayotte personne n'y pourrait rien et de plus la communauté internationale l'y encouragerait. Peut-être même trouverait-on sa décision « courageuse ». Ce que le dominant a fait il peut le défaire. Si, ce qu'à Dieu ne plaise, la Raison d'Etat voulait que soit sacrifié un petit peuple lointain et exogène alors le petit peuple lointain et exogène serait sans état d'âme sacrifié à la Raison d'Etat. Il n'y a aucun doute à avoir la dessus. La liberté si chère au cœur de nos mamans mahoraises dépend du bon vouloir du Prince et ne sera garantie que tant que le voudra le Prince.

Ayant proposé à Mayotte un choix possible entre le OUI et le NON, la République envisage donc chacune des réponses comme étant acceptable et c'est donc déjà un gage de liberté. Puisque la République veut vraiment que Mayotte soit libre alors elle acceptera que Mayotte puisse disposer d'une autonomie que la soumission aveugle et muette aux diktats républicains ne lui autorisera pas. Il ne s'agit pas pour Mayotte de changer brutalement de partenaires mais d'obtenir le droit d'en courtiser d'autres et le droit de chercher par elle-même, et ailleurs que dans les carnets d'adresses mzungu d'autres appuis, d'autres circuits, d'autres règles de fonctionnement que ceux qui lui seront inévitablement imposés par une départementalisation pure et dure. La liberté ne consiste pas à subir mais à chercher sa voie personnelle et à prendre soi même la direction de son propre avenir.

S'il n'est plus complètement avec le mzungu, l'avenir de Mayotte se trouve où ? Mais dans sa région voyons ! Placées où elles sont et avec leur histoire les Comores ne sont pas un Haïti en gestation mais ont naturellement vocation à devenir la Suisse de l'Océan Indien. Ou le Lichtenstein ; ou Monaco. Qu'on y songe, voila un ensemble de quatre îles dont aucune ne présente d'intérêt particulier. Les plages sont bien plus belles aux Seychelles et à Maurice, les sommets bien plus élevés et accessibles à la Réunion, les espaces bien plus vastes à Madagascar, la faune bien plus fascinante sur le continent tout proche. Les Comores ne disposent d'aucune ressource ni d'aucune richesse que l'on sache. C'est très exactement un endroit dont personne ne voudra jamais s'emparer et c'est déjà ça. Tout comme la Suisse dont personne n'a jamais voulu emprunter les montagnes. Et tout comme la Suisse aussi c'est un carrefour entre des vieilles civilisations, des cultures puissantes et des échanges en devenir, un point de passage entre l'Afrique et tous ses partenaires, Européens, Arabes, Indiens et bientôt –déjà—Chinois. Pendant et à mesure que l'Occident décline la nouvelle carte du monde verra s'installer un axe qui reliera la Chine et l'Afrique et tiendra nécessairement compte de l'Inde et de la péninsule arabique.

Ce n'est donc ni à Rambouillet ni à Marcoussis mais dans les Comores que se signeront les cessez le feu entre belligérants africains ou arabes.

C'est dans les Comores que se célèbreront leurs accordailles.

C'est dans les Comores que se scelleront leurs nouvelles alliances.

C'est dans les Comores que se signeront les contrats entre les nations africaines et leurs partenaires historiques ou à venir.

C'est dans les Comores que s'installeront les établissements bancaires dont se serviront les habitués de l'Océan Indien.

Et l'on voudrait que Mayotte n'en soit pas !!

Personne, et nous les signataires de ce plaidoyer moins que quiconque, personne ne désire que Mayotte rejoigne dès demain l'Etat comorien. Il n'est pas question d'appauvrir Mayotte ni d'envisager pour elle des conditions de fonctionnement plus aléatoires que celles qui régissent aujourd'hui son quotidien. Nul ici ne songe, non plus qu'à Paris, à demander à Mayotte de quitter la République.

Il est question d'œuvrer pour que Mayotte elle-même contribue activement à mettre en place une structure dans laquelle elle serait écoutée parce qu'elle aurait pris son sort entre ses propres mains.

Refuser le département ne changera rien nulle part dans l'immédiat et aucun châtiment ne tombera du Ciel ni de la République pour punir Mayotte d'avoir osé dire que le mot « département » ne convenait pas. Après le NON, le travail des hommes politiques consistera, comme à l'habitude, à obtenir le maximum de l'Etat pour ensuite le redistribuer à leur guise. Ils devront simplement se servir d'autres mots que « département » ou « zone ultra périphérique ».

« Impossible !! » trépigneront-ils.

Qu'en sait-on ? L'a-t-on jamais fait ? A-t-on même seulement essayé ? En a-t-on seulement discuté ? Bien sûr, un NON impliquerait nécessairement une certaine redistribution du pouvoir et quelques indignés et fébriles caciques trembleraient sur leurs ronds de cuir avant de prendre d'avec la politique locale une retraite glorieusement méritée. Mais le vide que créera leur départ ne sera d'aucune gène puisque c'est très exactement dans cet espace laissé vacant que pourra s'installer une jeunesse mahoraise pourvue enfin d'un but qui soit plus prometteur et plus stimulant que celui qui consiste à copier le maître en tous points de sa vie, à afficher ainsi des ambitions d'esclave et finir caissier ou agent de sécurité avec un bac plus cinq. C'est très exactement dans cet espace à construire que les jeunes de Mayotte et de la région pourront mettre au feu leurs idées, tester leurs audaces et canaliser leur ardeur.

Dire NON aurait en outre le dernier avantage de calmer à peu près tout le monde. Dernier mais pas le moindre.

Les wazungu pour commencer qui verraient, une fois la surprise passée et à l'exception de quelques joueurs de golf en colère, une bonne dose de pression disparaître de leurs effarouchées épaules. Sans doute seraient-ils toujours les Détenteurs Suprêmes du Savoir et du Pouvoir mais dépourvu désormais de toute urgence, leur enseignement aurait moins d'importance et, débarrassés de l'absolue et constitutionnelle obligation d'exiger de tout un chacun qu'il se comporte selon la norme, bon nombre d'entre eux se feraient plus discrets, ce qui ne sera pas dommage.

D'autres qui serraient surpris, stupéfaits, quasiment cloués sur place et soudainement calmés, ce sont les agités d'à côté qui se verraient brutalement privés d'un de leurs arguments majeurs pour continuer à traiter Mayotte comme une dépendance. Ce qu'elle n'est pas. Le choix du NON imposerait à tous que les actes de Maore valent largement les palabres de Ngazidja. Une fois la stupéfaction passée, et comme ils ne sont pas plus bêtes qu'ailleurs, ils traiteront Mayotte avec plus de respect, en partenaire, en égale, rassurés qu'ils seront qu' « attendre » est redevenu un verbe actif.

Et si, sans que cela lui coûte, dire NON permet à Mayotte de faire le calme autour d'elle, ma foi, ce sera tout bénéfice et tout à mettre au crédit de Mayotte qui aura prouvé qu'il n'est pas toujours besoin d'être riche pour être libre et que ses habitants pouvaient être aussi lucides que n'importe qui et politiquement plus mûrs que beaucoup.


Amine kam'gwavendzé

Malango - Mayotte

 

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